On a tous quelque chose en nous de Tennessee...
Ok, je vais essayer de faire court.
Arf comment faire court là-dessus?...
Disons que toute cette histoire de pièce me place dans une situation incomfortable avec moi-même. Une étrange histoire qui implique le passage éclair dans ma vie, mais que je n'oubliera sûrement pas, d'une dame du nom de Mme Waltz.
Bon, bon, j'explique...
RAPPEL: pour ceux qui ne suivent pas mon blog (shame on you!!), je vous rappelle que j'ai été
sélectionné au début du semestre pour jouer dans "The Glass Menagerie",
un classique américain étudié par tout le monde au lycée ici, qui m'a pris
énormément de temps et d'énergie, et qui s'est avéré être non pas une
petite pièce sympathique, mais l'un des plus gros budgets jamais
entrepris par l'université.
Autant dire que je me suis énormément
investi dans le rôle, le travaillant comme un dingue pour trouver des
dimensions intéressantes au personnage, et m'apercevant que ma nouvelle
manière d'approcher le fait de jouer sur une scène me rend mille fois
plus à l'aise que je ne l'étais lorsque j'ai décidé d'arrêter, il y a
quelques années.
Pour info, une bonne et une mauvaise nouvelle:
- Mauvaise: je n'ai ni photo (sauf quelques backstage), ni vidéo.
- Bonne: j'aurai les deux en super bonne qualité quand ils seront mis en vente, au banquet de fin d'année......... ;)
Pour faire court, je me retrouve dans un état un peu étrange, à mi-chemin entre un énorme sentiment d'accomplissement et une gigantesque peur. Attention, ce blog, pour un post va être un peu plus personnel et un peu moins drôle......... (ahah z'êtes prévenus!)
Bref, au début, j'avais reçu des commentaires plutôt positifs sur mon travail; mais le compliment ici est à prendre comme une politesse plus qu'autre chose, sacrés Américains... La metteur en scène, plus directe, bien que généralement contente de mes prestations était d'accord avec moi sur les moments que je pensais ne pas avoir bien faits, chaque soir.
La dernière était dimanche en début d'après-midi (c'est celle qui a été filmée d'ailleurs), et le double effet Kiss Cool "c'est la première fois qu'on joue pas en soirée" + "c'est la toute dernière fois qu'on joue" a été fatal. Je suis sorti de scène en rage, hors de moi, furieux d'avoir tout planté.
L'acteur principal était d'accord avec moi que j'étais moins présent que d'habitude, mais sur lui aussi, le double-effet Kiss Cool avait eu des conséquences pas trop plaisantes...
Et bien sûr, il fallait que ce soit ce jour, ce jour précis, qui était celui prévu pour que Mme Waltz, une actrice professionnelle, nous fasse un retour "critique" sur le show.
Tous le monde y est passé: le designer lumière, le designer costume, le responsable des projections, le responsable son, le designer décors, la metteur en scène, tout des gens qui font ce métier sérieusement, et à moins qu'ils ne soient déja payés pour, obtiennent leur diplôme dans leur domaine précis le mois prochain. Mme Waltz était tout de même positive, disant à chaque fois "J'ai bien aimé blablabla... mais j'aurais aimé voir blablabla", avec des blablabla de longueurs variables, mais toujours suffisantes pour le prendre comme une critique serrée...
Puis les acteurs. Rien de nouveau dans la structure de la critique: Roely a été très intéressant, mais un peu en dehors (on le savait); Lauren a construit un personnage complet et passionnant, mais aurait pu s'"ager" moins sur certaines scènes; Michelle a fait une excellente prestation (et je suis d'accord), mais aurait pu travailler l'infirmité de son personnage un peu plus et certaines scènes manquaient de ci, de ça, blablabla infâme...
Puis moi. Tout dernier. Tous les techniciens sont passés. Tous les acteurs sont passés. Les quelques dernières minutes, je les ai passées énervé contre moi-même. Prêt à me prendre une douche froide. Quoi qu'elle dise, rien à foutre. Ce sont eux les acteurs, les professionnels, pas moi.
Elle n'a pas dit grand chose, juste:
- Est-ce que vous retournez en France?
- Oui, bientôt.
- Oh. Et est-ce que vous continuerez d'étudier le théâtre?
- Non, non, je ne suis pas étudiant en théâtre.
- Oh. Double déception pour moi alors.
Vous imaginez que je me suis redressé tout droit sur ma chaise, foudroyé de surprise, et que les seuls mots que j'ai pu dire à ce moment-là (incluant les 10 minutes suivantes, d'ailleurs) ont été...
- Qu'est-ce... qu'est-ce que vous voulez dire?
Basiquement, sans trop en faire, elle a passé deux ou trois minutes à jeter des éloges sur mon travail, exactement sur les points précis que je savais avoir travaillé plus que les autres. La raison pour laquelle je ne détaille pas le contenu de son discours ici est qu'il me faut encore digérer tout ça et y repenser avant de sonner prétentieux sur mon blog bien aimé.
J'ai attendu le "mais j'aurais aimé voir". Je n'ai entendu à la place que "Bien, merci à tous, vous pouvez être fier de votre spectacle, bonne continuation".
Le seul et unique sans une remarque négative. Et le seul et unique dont ce n'est ou ce ne sera pas le métier.
Vous imaginez que tout homme sensé aurait ressenti une énorme vague de soulagement à ce moment. Ce qui est sans doute la raison pour laquelle moi, j'ai commencé à paniquer encore plus.
Nah sans rire, et pour finir là-dessus (allez hop on en parle pu), c'est un de mes principes, tenter de ne pas regretter les gros choix que je fais et aller de l'avant. Mais là non. Pas possible du tout.
Là, pour la première fois depuis que j'ai fait ces choix il y a plusieurs années........ je ne dirais pas que j'ai l'impression d'avoir fait le mauvais choix, ce n'est pas du tout ça; mais pour la première fois en trop longtemps, je recommence à en douter très très très sérieusement.
Certains disent que Tennessee Williams a apporté une sensation étrange et mitigée dans leur vie, de doute et de nostalgie. Bah les gars, venez un peu comparer qu'on rigole...